Le football et les Bleus au Brésil, c’est le Crédit Agricole. La voile et le tour du monde d’Armel Le Cléac’h, la Banque Populaire. Le cyclisme, c’est LCL sur le maillot jaune. Le rugby, la Société Générale. Le tennis et Roland Garros, BNP Paribas. Et depuis la semaine passée, le handball et le basket, c’est le terrain de la Caisse d’Epargne. Chaque grande banque française semble avoir choisi son sport. Pourquoi s’éviter si soigneusement ? Eléments de réponse.

Mercredi dernier, la Caisse d’Epargne a annoncé un partenariat avec les équipes de France masculines et féminines de basket et de handball. A 2 ans des prochains Jeux olympiques, l’événement phare pour ces équipes nationales. Et la banque pose déjà ses pions pour Rio 2016 en lançant dès à présent un nouveau « team Caisse d'Epargne » qui réunira « des athlètes olympiques et paralympiques sélectionnés par les caisses (…) régionales », comme en 2012 et 2014. Cette triple annonce confirme ainsi une tendance forte dans le monde du sponsoring : les banques tiennent à être présentes sur le terrain sportif… tout en évitant soigneusement de se confronter à l’intérieur d’une même discipline.

Chacun son pré-carré

Et la tendance existe de longue date. Le Crédit Agricole compte parmi les partenaires de la Fédération française de football depuis 1974 et vient de renouveler son soutien jusqu’en 2018. Le partenariat LCL-Tour de France, entamé par le Crédit Lyonnais en 1981, court lui aussi jusqu’en 2018. La Banque Populaire fête sa 25e année de présence dans le milieu de la voile. BNP Paribas a fêté l’an passé son 40e anniversaire dans le tennis. La Société Générale a elle signé son premier contrat de partenariat avec la Fédération française de rugby en 1987.

Reste des exceptions. La Banque Postale a soutenu la Route du Rhum de 2006 à 2012, avant de quitter le monde de la voile pour s’investir plus fortement dans le mécénat social avec L’Envol, une association dédiée aux jeunes élèves. Le Crédit Mutuel est pour sa part présent dans plusieurs sports via ses fédérations régionales, comme actuellement avec le bateau Bretagne-Crédit Mutuel Espoir de Sébastien Simon sur la Solitaire du Figaro, mais a opté pour une stratégie nationale divergente, avec « la musique comme axe majeur de communication », comme le confirme le service communication de la confédération nationale du Crédit Mutuel.

Sponsor monosport et sur la durée : stratégie payante

Les banques s’évitent-elles ? « Il ne s’agit pas d’éviter les sports où les autres banques sont présentes, mais bien de concentrer les efforts sur le sport numéro 1 en France (le football, NDLR) que le Crédit Agricole soutient depuis 40 ans et dont les valeurs d’universalité, de proximité, de diversité sont cohérentes avec les siennes », répond, par écrit, un porte-parole du Crédit Agricole.

Thierry Bouvard, responsable sponsoring de la Banque Populaire, insiste lui sur le fait que « la stratégie la plus ‘‘impactante’’, c’est le monosport ». « BNP Paribas avec le tennis, la Société Générale avec le rugby et nous avec la voile, c’est-à-dire des opérations centrées sur un sport sur le long terme, ont les meilleures retombées en termes d’image et de notoriété (1). »

La Caisse d’Epargne, en concurrence avec d’autres banques à la fin des années 2000 dans le football et le cyclisme, a réorienté son sponsoring autour des JO en 2011, au moment du lancement de sa campagne « Nouvelle définition ». L’Ecureuil semble mener une stratégie d’implantation dans l’olympisme et désormais dans le basket et le handball. Les Caisses d’Epargne sont déjà partenaires de clubs en régions et ont soutenu des basketteurs et handballeurs dans le cadre du programme olympique « Team Caisse d’Epargne ». Résultat : « Selon une étude réalisée en novembre 2013 par Kantar Média, 8 Français sur 10 associent naturellement la Caisse d’Epargne au basket-ball et au handball (2) », affirme le directeur de la communication Thierry Martinez.

Les retombées se mesurent en termes d’image

Thierry Bouvard, de Banque Populaire, explique aussi cette tendance à éviter la concurrence frontale par ses effets néfastes : « Se battre les uns contre les autres serait destructeur de valeur. On s’évite soigneusement aussi pour ne pas perdre de l’argent. » Car en étant sponsors, les banques ne cherchent pas à se faire connaître, plutôt à améliorer leur image selon Thierry Bouvard : « Pour mesurer l’impact de notre présence dans la voile, nous regardons si les gens nous voient plus grand, plus audacieux, plus courageux, etc. » Soit les valeurs théoriquement véhiculées par les skippers à l’assaut du grand large.

Les partenariats permettent aussi d’offrir certains privilèges aux clients. La Caisse d’Epargne promet par exemple des « réservations en avant-première et tarifs préférentiels » pour les matches des équipes de France de basket et de handball, des « rencontres avec les joueurs ou les entraineurs », etc.

Avec la coupe du monde au Brésil, qui commence cette semaine, le Crédit Agricole souhaite lui « consolider et dynamiser ses communautés sur les réseaux sociaux - notamment sur la page Facebook ‘‘On a tous un côté foot’’ qui compte plus de 250.000 fans. Et surtout faire savoir que son partenariat va bien au-delà de celui de l’équipe de France », détaille un porte-parole. Avant d’insister : « [Le Crédit Agricole] est le partenaire de tous les footballs », histoire de se prémunir contre tout nouveau scandale lié à l’équipe de France.

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(1) Thierry Bouvard appuie son propos sur des études de Sportlab et KantarSport. Selon lui, « ces trois banques font partie des quinze marques les plus citées par les Français interrogés sur les marques impliquées dans le sport ».

(2) L'étude en question a mesuré la légitimité de l'association de la banque avec le sport : 81% des sondés auraient répondu oui pour le basket, 76% pour le handball.