Depuis le 6 juin dernier, les propriétaires de bois et forêts peuvent ouvrir un compte épargne d’assurance pour la forêt (CEAF). Problème, selon le rapport du député PS Christian Eckert, publié le 27 novembre, aucun CEAF n’a été ouvert. Si elle est validée en l’état par le Conseil constitutionnel, la loi de finances rectificative pour 2013 va remplacer ce dispositif par le compte d’investissement forestier et d’assurance. Principal changement : une incitation fiscale centrée sur l’ISF et les droits de mutations au lieu de l’impôt sur le revenu.

Une mesure est passée quasiment inaperçue, au rayon épargne, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2013 : la création du compte d’investissement forestier et d’assurance (CIFA). Flash-back. La loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 a institué le CEAF. Mais il a fallu attendre la parution d’un décret au 3 juin 2013 pour en connaître le fonctionnement exact et pour lancer la commercialisation. En bref, il s’agit d’un livret réservé aux propriétaires de bois et forêts. Les intérêts sont exonérés d’impôt sur le revenu dans la limite de 2% de rémunération.

Lire : Le fonctionnement du compte épargne d'assurance pour la forêt précisé par décret

Le 17 octobre dernier, après moins de 5 mois de fonctionnement, les ministres du Redressement productif Arnaud Montebourg et de l’Agriculture Stéphane Le Foll ont annoncé la création d’un compte d’investissement forestier et d’assurance (CIFA), dans le cadre du « plan bois », sans donner d’indications sur la destinée du CEAF. Le PLFR, voté définitivement hier par l’Assemblée nationale, prévoit la création du CIFA au 1er janvier 2014. En théorie, le CIFA ne remplace pas totalement l’ancien dispositif puisque les titulaires d’un CEAF auront le choix de le convertir ou non, à partir du 1er janvier 2014, en CIFA. Mais un rapport du député PS Christian Eckert, publié le 27 novembre dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2013, précise qu’aucun CEAF n’a été ouvert et que l’objectif est bel et bien de le « remplacer » par un mécanisme plus adapté.

Exonération de l’ISF à 75%

Comment transformer un produit n’ayant séduit aucun propriétaire forestier en un compte d’investissement attractif ? Le PLFR (1) construit le CIFA en reprenant les grandes lignes de son prédécesseur. Parmi les conditions à l'ouverture d’un compte : être « propriétaire de bois et forêts » et souscrire à une assurance pour tout ou partie de la surface forestière, « couvrant notamment le risque de tempête ».

Les principaux changements sont d’ordre fiscal. Au contraire du CEAF, le CIFA ne ressemble plus en rien à un livret défiscalisé. Les intérêts seront soumis à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux mais les sommes déposées seront, à 75%, exonérées d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et, en cas de donation ou de succession, de droits de mutations à titre gratuit (2).

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Autre changement visant clairement les propriétaires aisés : le plafond global, fixé à 50.000 euros pour le CEAF, est supprimé. Par ailleurs, le plafond des dépôts, de 2.000 euros par hectare de forêt pour le CEAF, est porté à 2.500 euros pour le CIFA. En revanche, les sommes déposées sur le CIFA proviendront désormais uniquement des ventes de coupes forestières afin de favoriser une « gestion active [des] bois et forêts », selon les explications fournies dans le rapport du député Christian Eckert.

Une marge de liberté pour dépenser l’épargne forestière

Côté dépenses, peu de changement. Comme pour le CEAF, les sommes déposées sont employées « pour financer les travaux de reconstitution forestière à la suite de la survenance d’un sinistre naturel d’origine sanitaire, climatologique, météorologique ou lié à l’incendie, ou les travaux de prévention d’un tel sinistre », précise le PLFR (3). Cependant, désormais, dans le cadre du CIFA, 30% des sommes déposées peuvent être utilisées « au titre d’une année » à des « travaux forestiers de nature différente ».

La rémunération ? Le texte de loi n’en fait pas mention, laissant ainsi une marge de liberté aux banques et assureurs qui choisiront de commercialiser ce produit. Mais le CIFA a avant tout été imaginé comme un outil de défiscalisation, l’Etat cherchant avec ce produit à développer l’assurance forestière et l’investissement en forêt privée.

(1) Le CIFA est institué par l’article 32 du projet de loi de finances rectificative pour 2013 adopté par l’Assemblée nationale.

(2) Parmi les conditions posées par le texte de loi : que l’héritier, légataire ou donataire s’engage à employer les sommes déposées conformément aux conditions d’existence du CIFA et présenter une garantie « de gestion durable » des bois et forêts.

(3) En cas de non respect de cette condition, le CIFA est clos. Le compte d'investissement est aussi fermé en cas de « cessation totale ou partielle de la souscription de l'assurance » ou si « le titulaire du compte cède l'intégralité de la surface de bois et forêts dont il est propriétaire ».