Le tribunal correctionnel de Paris a prononcé mercredi pour la première fois des condamnations, à 8 et 10 mois de prison avec sursis, dans un dossier de fraude fiscale ouvert sur la foi des fichiers HSBC remis à la justice par Hervé Falciani.

L'ancien informaticien de la banque HSBC à Genève, Hervé Falciani, a divulgué en 2008 des fichiers permettant de découvrir des milliers d'évadés fiscaux dans le monde, ce qui lui vaut d'être accusé en Suisse du vol de ces fichiers. Il explique désormais travailler avec le fisc français contre l'évasion fiscale.

Mercredi, la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris, spécialiste dans les affaires financières, a condamné deux frères poursuivis sur la foi de ces fichiers. Leurs épouses ont quant à elles été relaxées. La justice leur reproche la détention de plusieurs comptes en Suisse à HSBC Private Bank non déclarés auprès du fisc français, crédité en 2007 pour le premier de plus de 800.000 dollars, de près de 1,9 million de dollars pour l'autre, ce qu'ils contestent. Selon le fisc, ils auraient ainsi éludé au total environ 100.000 euros d'impôts sur le revenu et la fortune.

L'un d'eux s'était défendu en expliquant que, titulaire de comptes chez HSBC à Paris, ses données personnelles avaient peut-être été transmises à la banque en Suisse.

Le tribunal rejette l'argument de preuves déloyales

Leurs avocats ont contesté l'utilisation de moyens de preuves déloyaux mais le tribunal a rejeté leurs arguments, estimant notamment que « la preuve n'est pas rapportée que les services fiscaux aient confectionné (...) l'un des éléments de preuve soumis à l'examen du tribunal ».

« L'utilisation à titre de preuve du résultat de l'exploitation des données détenues par Hervé Falciani en connaissance de leur provenance ne saurait être analysée comme un procédé déloyal et illicite rendant ces éléments de preuve irrecevables devant le tribunal correctionnel », selon le jugement consulté par l'AFP. « Le manque de fiabilité intrinsèque des éléments d'information initiaux analysés par les services fiscaux soutenue par la défense ne saurait gommer la concordance réelle des multiples données à caractère personnel sur cette documentation qui n'ont pu émaner que des intéressés eux-mêmes ou de leur entourage familial également concerné », soulignent les juges.

Ils considèrent que « l'affirmation de la provenance frauduleuse au préjudice de la banque HSBC Private Bank de Genève des données contenues dans les ordinateurs de son ex-employé Hervé Falciani, loin de créer un doute sur l'authenticité de ces données renforce l'idée qu'elles son réellement issues de la banque HSBC Private Bank ».

L 'un des prévenus fera appel

L'avocat de l'un des prévenus, Me David-Olivier Kaminski, a annoncé que son client ferait appel, estimant qu'il a été condamné « sur la foi d'un fichier qui n'existe pas judiciairement ». « Tout le monde s'accorde à reconnaître et constater qu'il a subi moultes modifications et peut-être même altérations avant de faire l'objet d'une compression informatique, qui n'a même pas été retrouvée dans son ensemble par le ministère public », a-t-il déclaré à l'AFP.

Outre l'information judiciaire ouverte notamment en avril pour « blanchiment de fraude fiscale en bande organisée », qui vise les pratiques de HSBC, plusieurs dizaines de procédures judiciaires pour « fraude fiscale » sont en cours. A Paris, on recense 27 enquêtes préliminaires et cinq informations judiciaires, selon une source judiciaire. Le 27 novembre, saisie par un mis en examen dans l'une de ces instructions, la chambre criminelle de la Cour de cassation a validé les poursuites fondées sur ces fichiers.