Le gouvernement a lancé en avril dernier la « silver économie », une filière regroupant les entreprises agissant pour ou avec les personnes âgées. Le Commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP), ex-Centre d’analyse stratégique, a publié un rapport à ce propos le 5 décembre. Parmi les propositions : créer un nouveau livret réglementé, défiscalisé et dédié aux plus âgés, le Livret Argenté.

Le Livret Argenté n’est pour l’heure qu’une piste de réflexion. Mais le gouvernement risque de l’étudier avec attention puisqu’elle émane d’un rapport du CGSP, soit l’entité chargée de déterminer de « grandes orientations d’avenir de la nation » et de préparer les réformes. Ce rapport a en outre été préfacé par le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg et par la ministre déléguée aux Personnes âgées Michèle Delaunay, lesquels qualifient dans ce texte les « propositions autour du Livret Argenté » de « tout à fait essentielles ».

Ce rapport s’appuie sur une projection statistique : en 2035, le nombre de seniors devrait augmenter de 80% par rapport à 2005. Le gouvernement souhaite donc développer la « silver économie » afin de faire du vieillissement de la population un levier de croissance plutôt qu’un poids pour les finances publiques. Parmi les six propositions du CGSP : « susciter dans les établissements financiers la création de produits adaptés à la clientèle âgée ».

Une « transformation optionnelle du Livret A »

Le commissariat général est parvenu à cette conclusion après avoir établi un double constat. Le taux d’épargne augmente avec l’âge, atteignant 16% chez les 60-65 ans, 20% chez les 65-74 ans et 23% chez les plus de 75 ans. En parallèle, « l’aversion au risque semble s’accroître en vieillissant », souligne le rapport du CGSP. Conséquence : les seniors immobilisent leurs économies sur du patrimoine ou des placements servant peu au financement de l’économie française. Le commissariat général a donc dessiné les contours d’un produit sûr mais qui laisse l’épargne disponible afin de pousser les seniors à consommer, le Livret Argenté.

Comment fonctionnerait-il ? Le rapport préconise de rendre l’accès au Livret Argenté possible, « par exemple », via une « transformation optionnelle des Livrets A à partir de 60 ans » ou du moins dès « l’arrivée à la retraite ». Afin d’inciter les personnes âgées à opérer la bascule, ce nouveau livret défiscalisé offrirait un rendement « plus élevé » que le Livret A. Le rapport n’apporte en revanche aucune précision sur les plafonds de dépôts.

20% de l'épargne disponible à tout moment

La contrepartie de cette rémunération élevée serait la liquidité partielle du produit. Le CGSP donne en exemple un seuil de 20%. L’épargnant pourrait ainsi utiliser 20% de ses économies quand bon lui semble, la possibilité de débloquer l’ensemble ou une part plus significative restant ouverte dans certains cas : décès du conjoint, dépendance de l’épargnant ou du conjoint, déménagement, travaux, mariage ou chômage des enfants, etc. Le capital resterait ainsi garanti pendant toute la durée d’ouverture du livret même si le rapport indique qu’une tarification particulière pourrait s’appliquer en cas de déblocage anticipé. Le CGSP compte ainsi favoriser une « épargne préparant le vieillissement et mobilisant l’épargne des âgés pour favoriser certains types de dépenses ».

Pour l’Etat, l'intérêt est double : favoriser la consommation et financer l'économie. Le fait de bloquer 80% de l’encours pourrait ainsi permettre d’investir ces sommes « sur le marché actions » afin de les rendre plus productives. Et ce tout en allouant une partie de ces économies au fonds d’épargne de la Caisse des dépôts, qui permet notamment de financer des politiques d’intérêt général, comme pour le Livret A.