Dépourvus de risque et bénéficiant d’une garantie du capital, les fonds en euros sont largement plébiscités par les épargnants. Ils représentent 86% de la collecte d’assurance-vie (1). Cependant, les rendements de ces fonds sont devenus de moins en moins attractifs au cours des dernières années, se rapprochant de ceux du Livret A. A l’approche des annonces des rendements, les professionnels du secteur livrent leurs prévisions.

Les rendements des fonds en euros sont en baisse depuis plusieurs années (5,3% en 2000, 4,2% en 2005 selon la FFSA) et ceux servis pour 2012 ne devraient pas inverser la tendance. En effet, les professionnels s’attendent à une stabilité (soit 3% net de frais mais avant prélèvements sociaux, comme en 2011), voire à une baisse.

Néanmoins, celle-ci devrait rester limitée. « Il est difficile d’imaginer que les assureurs servent pour les fonds en euros, un rendement inférieur - après CSG et CRDS - à celui des placements administrés tels que le Livret A à 2,25%. Ainsi, en prenant le taux moyen des rendements des fonds euros de 2011 qui s’élève à 3% et en enlevant 15,5% de CSG-CRDS, la rentabilité dépasse certes 2,25%, mais de peu », détaille Daniel Collignon, directeur général de Spirica, filiale de Crédit Agricole Assurances. « Nous sommes dans un environnement de taux d’intérêt bas avec des performances boursières qui sont médiocres. Ainsi, les rendements seront certainement en continuité, voire en baisse, par rapport à 2011 », estime Tristan Palerm, actuaire, senior manager chez Optimind Winter.

Une dispersion plus forte que les années précédentes

Cette perspective est principalement liée à la chute depuis le début de l’année des taux des obligations souveraines, titres de référence du fonds en euros. Cependant, le contexte de l’année n’est en rien semblable à celui de 2011. En effet, les rendements l’an passé avaient été largement impactés par la dépréciation des obligations souveraines grecques. En retirant cet événement exceptionnel, le rendement moyen aurait été compris entre 3,30 et 3,40%, indique le cabinet de conseil Facts & Figures, qui prévoit un taux de rendement moyen de 3% pour 2012, avec plus ou moins 0,20%. « Les rendements servis pour 2012 devraient être caractérisés par une dispersion encore plus forte que les années précédentes, que ce soit entre les assureurs eux-mêmes ou entre les différents produits d’un même assureur », détaille Cyrille Chartier-Kastler, président de Facts & Figures.

En cause, des politiques de gestion financière des fonds en euros de plus en plus différenciées. Ainsi, si certains assureurs vie privilégient la sécurité et continuent à investir massivement dans des obligations d’Etat français - avec une OAT 10 ans (2) située à 2,26 % -, d’autres considèrent que les taux vont remonter et ont gardé un poids important en monétaire. Certains acteurs ont aussi opté pour une politique d’investissement dans l’immobilier (ces actifs pouvant représenter entre 7 et 12 % des fonds en euros), d’autres ont gardé une part importante d’actions (au-delà de 10 %) ou détiennent une part importante de fonds structurés en portefeuille.

Cela pourrait se traduire par quelques mauvaises surprises en termes de taux moyens servis par certaines compagnies qui ont fait des choix de gestion financière peu pertinents en 2012, et a contrario, des rendements plus élevés que prévus pour les assureurs qui ont optimisé leur gestion financière, ajoute le cabinet de conseil.

La PPE pour dynamiser les rendements

Point positif concernant les rendements, le secteur pourra compter sur la Participation pour provisions aux excédents (PPE) (3) pour dynamiser les rendements. En effet, si les assureurs vie en ont consommé un peu en 2011, ils disposent encore de ces réserves. « Le secteur garde en moyenne un niveau de PPE qu’on peut situer entre 1,10 % et 1,80 % fin 2011. Rappelons toutefois que toutes les sociétés n’ont pas pour autant de PPE en portefeuille et que d’autres - généralement investies sur des engagements longs comme de la retraite - peuvent avoir 3 à 4 % de PPE en réserve », ajoute Cyrille Chartier-Kastler, en rappelant que la PPE appartient aux assurés et doit leur être restituée dans un délai maximum de huit années suivant sa constitution.

Les opérateurs qui ont mis en place des PPE devraient donc servir des taux dans la moyenne haute du marché. « Nous faisons l’hypothèse que ces opérateurs en prélèveront une partie afin de délivrer des taux moyens situés entre 3,00 et 3,20 % au titre de 2012 », conclut Cyrille Chartier-Kastler. Reste l’évolution des marchés actions, qui peut encore réserver des surprises d’ici la fin de l’année, souligne Daniel Collignon. Les actions représentent un peu plus de 10% du fonds en euros en moyenne.

(1) Source : Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) et Groupement des entreprises mutuelles d’assurance (Gema), 2011.

(2) Obligations Assimilables du Trésor. Elles représentent une part d’emprunt d’Etat.

(3) La PPE permet aux assureurs de mettre en réserve une partie des bénéfices financiers. Elle est utilisée par les compagnies pour lisser leurs rendements dans le temps. Elle est ainsi souvent dotée les bonnes années et restituée les années difficiles.