Avec désormais une quinzaine d’acteurs, le marché français de la banque à distance est en passe d’arriver à maturité. Les Français ont-ils pour autant adopté ce nouveau mode de relation avec leurs banques ? Et les services des banques sont-ils suffisants ? Plusieurs études ont fait récemment le point sur ces questions.

« L’Internet bancaire est sorti du champ historique de la consultation et des opérations simples ». Le constat est tiré du baromètre EFMA (une association européenne qui regroupe des professionnels de la banque de détail) - Exton Consulting (1). Cette étude réalisée dans 6 pays européens (dont la France), ainsi qu’en Turquie, estime que 79% des internautes réalisent aujourd’hui des « opérations impliquantes en ligne » (gestion de placements, souscription de produits, simulations, etc), avec un très haut taux de satisfaction.

La seule souscription en ligne de produits financiers concerne désormais plus d’un internaute sur trois, avec toutefois des disparités importantes : 57% des Polonais l’ont déjà fait, plus de 40% des Turcs ou des Britanniques, mais seulement 18% des Français.

L'agence physique reste visitée

C’est la première limite du développement de la banque en distance dans l’hexagone : à tort ou à raison, les Français ont toujours une confiance limitée dans la sécurité des banques sur Internet, et préfèrent très majoritairement effectuer les opérations sensibles dans une agence physique. Selon le baromètre FEVAD (Fédération du e-commerce et de la vente à distance) réalisée par Médiamétrie/Netratings (2), l'agence reste en 2012 le canal de relation le plus utilisé par les Français (83%, -2% par rapport à 2011), devant Internet (77%, +2%).

Le web la supplante par contre nettement dans un domaine : la recherche d’informations sur les produits. Un tiers des internautes français déclarent avoir utiliser les ressources du net sur le sujet au cours des 6 mois précédant l’étude, contre 22% à s’être déplacés dans leur agences. Avantage principal pour les usagers : la possibilité de comparer les produits et les prix.

Les usages mobiles progressent également : ils concernent en 2012 45% des « mobinautes » français (ceux qui utilisent leur mobile pour accéder à Internet), dont une moitié a utilisé une application dédiée. Toutefois, il s’agit d’un usage complémentaire à Internet : seuls 7% des personnes interrogées utilisent en effet uniquement leur mobile pour gérer leurs comptes.

Si l’Internet progresse donc, en France comme ailleurs, les clients des banques sont encore loin de basculer définitivement dans l’ère du tout-digital. A l’échelle européenne, seuls les Néerlandais sont majoritairement prêts pour une relation 100% à distance, tandis que plus d’un Allemand, d’un Turc et d’un Italien sur cinq préfèrent toujours se déplacer en agence pour une opération aussi simple que la consultation de leur solde.

En France, l’appétence pour les banques 100% en ligne progresse, mais reste encore très minoritaire. 14% des internautes sondés y possèdent déjà au moins un un compte, et 17% y songent (+3% par rapport à 2011). Leurs motivations sont toujours les mêmes : les tarifs et l’autonomie.

Modèle de banque multicanal

Les attentes de la majorité des internautes concernent plutôt le multicanal : la possibilité d’utiliser indifféremment Internet, le téléphone ou l’agence, en fonction des moments et du type d’opérations. C’était d’ailleurs le constat posé il y a quelques mois par une agence française de consulting, Ailancy, dans une étude sur les différentes stratégies des banques à distance. Selon l’agence, le marché de la banque à distance, découpé en trois segments (banques en ligne « pure-players », agences virtuelles des grands réseaux et banques à distance ciblées ou affinitaires) montrent des signes de convergence vers un modèle unique de banque multicanal.

D’un côté, les « pure-players » tendent à développer leur catalogue de produits et services. Certaines, également, se dotent de points de contact physiques, à l’image du « Café ING Direct ». De l’autre, les agences virtuelles des grandes enseignes tentent de reprendre à leur compte le principal argument des « pure-players » : les tarifs bas et les promotions exclusives. Elles investissent également dans la communication et le marketing direct « pour compenser l’absence de contacts réguliers avec le client », explique l’étude.

Toutefois, cette adaptation à l’évolution des usages est encore imparfaite, et implique selon Ailancy des améliorations dans les prochaines années. Premier enjeu : les banques à distance doivent convaincre qu’elles sont de vraies banques, en proposant des catalogues complets, en travaillant la proximité avec le client et en faisant les preuves de leur sûreté. Elles doivent également continuer à innover, notamment en améliorant leurs dispositifs de vente à distance (signature électronique, dématérialisation des contrats, etc). Enfin, elles doivent encore assurer une meilleure continuité de la relation à travers les différents canaux, par exemple en proposant à leurs clients des conseillers attitrés. Un large chantier.

 (1) Enquête réalisée sur Internet en décembre 2011 auprès de 3.500 internautes âgés de 18 à 74 ans dans 7 pays : France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni.

(2) Etude menée en mars 2012 auprès de 2.888 internautes de 15 ans et plus.