Une étude rendue publique par le Centre d’analyse stratégique (CAS), organisme rattaché au Premier ministre, évoque l’existence, en France, d’une bulle immobilière.

La note de 12 pages, publiée le 29 avril dernier, s’intéresse à l’évolution des prix du logement en France sur les 25 dernières années. Le CAS y pointe notamment la déconnection croissante, depuis une quinzaine d’années, entre les prix d’achats et les prix des loyers.

D’après les statistiques rassemblées dans l’étude, ces derniers ont en effet évolué au même rythme, en moyenne, que le revenu disponible moyen des ménages français, soit une hausse de 30% sur la période. Si les Français consacrent une part croissante de leur budget au logement, c’est avant tout parce qu’ils vivent généralement dans des logements plus grands et mieux équipés. Dans le même temps, les prix d’acquisition des logements, à qualité constante, ont eux doublé. Depuis le dernier point bas du marché, en 1998, l’indice de prix des logements anciens a même été multiplié par 2,5.

Rareté du foncier

Comment expliquer cet écart ? Pour le CAS, l’addition de différents facteurs, comme l’augmentation du coût de la construction, l’existence d’une pénurie de foncier, les aides publiques au financement (du type prêt à taux zéro) ou la baisse des taux d’intérêt, n’y suffisent pas complètement.

Au cours de la dernière décennie, les coûts de construction ont augmenté en moyenne de 3,4% par an, tandis que le prix des logements neufs progressait lui de 5,5% pour les appartements, et de 5,9% pour les maisons. L’étude montre qu’un tel écart n’existait pas au cours de la décennie précédente. La hausse dans l’ancien a été encore plus rapide, ce qui laisse penser que la rareté du foncier, notamment en région parisienne, a été un facteur plus déterminant dans la hausse des prix.

Secundo-accédants

Déterminante également, la baisse des taux d’intérêts, qui ont atteint un plus bas historique en 2010. Toutefois, le CAS montre que le rythme d’augmentation des prix, ces dernières années, a été plus soutenu que celui de la baisse des taux. « Il semble aujourd’hui probable que [la baisse des taux d’intérêt] ait biaisé les anticipations à la hausse, créant une bulle sur le marché immobilier français », explique l’étude.

Le CAS formule une autre hypothèse pour comprendre la résistance des prix de l’immobilier à la crise économique de 2008. Il observe en effet, à l’échelle européenne, que la hausse des prix des logements a été plus forte dans les pays où le taux de propriétaires est fort. « Les propriétaires sont beaucoup moins sensibles à la hausse des prix que les accédants, puisqu’ils bénéficient, lorsqu’ils se portent acquéreurs d‘un nouveau logement, de la plus-value réalisée sur la vente de leur logement précédent. »

Un risque d’éclatement ?

Y a-t-il un risque d’éclatement de la bulle ? Le CAS ne tranche pas vraiment la question. Il considère toutefois que les effets néfastes d’un tel événement seraient relatifs en France : « La dette immobilière des ménages français demeure modérée et la pratique de l’extraction de plus-value latentes, courante dans les pays anglo-saxons, ne s’est pas développée. Le système bancaire est donc peu exposé à un retournement brutal du marché immobilier. »

L'organisme n’en prodigue pas moins quelques conseils pour prévenir un éventuel éclatement : simplifier les procédures d’autorisation de construction ; éviter de subventionner la demande dans les zones les plus tendues ; réduire les freins à la mobilité résidentielle.