Le Crédit Mutuel Arkéa a dénoncé mardi, par la voix de son président Jean-Pierre Denis, "des dérives" dans la gouvernance du groupe Crédit Mutuel, en particulier une propension à la concentration des pouvoirs du président Michel Lucas.

Lors du conseil d'administration de la Confédération nationale du Crédit Mutuel, organe réunissant l'ensemble des fédérations du groupe, qui s'est tenue mi-janvier, Michel Lucas a proposé la suppression du poste de vice-président délégué, fonction traditionnellement occupée par un représentant du Crédit Mutuel Arkéa, groupe constitué autour de trois fédérations du Crédit Mutuel (Bretagne, Sud-Ouest et Massif Central). Cette suppression a été entérinée lors d'une assemblée générale extraordinaire, le 15 février.

Pour Jean-Pierre Denis, cette décision, qui a été prise de manière « expéditive et sans ménagement », a privé la confédération d'« un point d'équilibre au sein de la gouvernance du Crédit Mutuel ». « La confédération ne joue plus son rôle », estime-t-il, car « elle est devenue l'instrument captif du principal groupe du Crédit Mutuel », le Crédit Mutuel Centre Est Europe, la plus puissante des fédérations du groupe, qui a agrégé autour d'elle neuf autres fédérations, créant l'entité CM10-CIC.

Toujours selon Jean-Pierre Denis, cette situation génère des conflits d'intérêt. Pour marquer son désaccord, il a d'ailleurs démissionné du conseil d'administration de la Confédération, imité par les cinq autres administrateurs issus du Crédit Mutuel Arkéa. Six autres administrateurs issus de ce dernier prendront leur place.

« Concentration du pouvoir excessive »

Plus généralement, la suppression du poste de vice-président délégué est symptomatique, selon lui, « de dérives » au sein du groupe Crédit Mutuel. « On a aujourd'hui une concentration du pouvoir qui est excessive, pour ne pas dire extrême, dans les mains d'un seul homme ».

Michel Lucas a été désigné à la présidence de la Confédération mi-octobre, en remplacement d'Etienne Pflimlin, démissionnaire. Il a alors abandonné les fonctions de directeur général, qu'il occupait jusque-là. Le patron de la Confédération, qui est aussi celui du Crédit Mutuel Centre Est Europe, a, selon Jean-Pierre Denis, « une vision centralisée du groupe qui est orthogonale avec l'histoire du Crédit Mutuel. En tout cas, elle n'est pas compatible avec la vision de notre groupe » Crédit Mutuel Arkéa, qui est « celle d'une banque territoriale, avec des racines, des centres de décision qui ne sont pas à Paris ».

« Concours de beauté »

Hors CM10-CIC, six entités sont encore indépendantes, dont le Crédit Mutuel Arkéa. Parmi elles, le Crédit Mutuel Anjou a indiqué qu'il envisageait de rejoindre CM10-CIC et prendrait sa décision en juin, confirmant une information de La Tribune. Le Crédit Mutuel Maine-Anjou Basse-Normandie a, en revanche, répondu qu'aucune réflexion n'était en cours sur le sujet. Le CM10-CIC n'a pas souhaité s'exprimer sur les griefs exposés par Jean-Pierre Denis.

Interrogé sur une éventuelle scission du groupe Crédit Mutuel, Jean-Pierre Denis a précisé qu'Arkéa avait « souhaité marquer une distance, pas quitter le Crédit Mutuel ». « Ce n'est pas une question de rivalité entre les hommes ou entre les groupes. On n'est pas dans un concours de beauté entre l'est et l'ouest de la France ».