« Mauvais signal pour l’épargne » selon Laurence Parisot, la présidente du Medef ; « mesurettes » pour Martine Aubry, la patronne du Parti socialiste : de toutes parts, les mesures de taxation du capital incluses dans le projet de réforme des retraites n’ont guère convaincu. Mais que prévoient-elles exactement, et sur quel volume de recettes le gouvernement table-t-il ?

Hausse du prélèvement forfaitaire libératoire (PFL)

Le prélèvement forfaitaire libératoire, optionnel, permet aux contribuables qui le souhaitent, de payer « à la source » les impôts dus au titre des intérêts et dividendes perçus. Il se substitue alors au barème progressif de l’impôt sur le revenu, en taxant ces sommes à un taux fixe de 18%, quel que soit le niveau d’imposition du contribuable. Si la réforme est votée en l’état, ce taux passera à 19%. Selon le gouvernement, « la mesure ne concernera que les ménages les plus aisés, qui ont seul intérêt à opter sur le PFL. » A savoir, actuellement, les foyers fiscaux affichant en 2009 un revenu net global par part supérieur à 26.031 euros.

Gain attendu : 130 millions d’euros en 2011, 160 millions d'ici 2020.

Plus-values des valeurs mobilières : hausse du prélèvement et disparition du seuil de cession

Actuellement, les plus-values réalisées par un contribuable lors de la vente d’actions ou d’obligations sont exonérées d’impôt sur le revenu (mais plus de prélèvements sociaux depuis le 1er janvier 2010), dès lors que leur valeur annuelle ne dépasse pas un seuil fixé en 2010 à 25.830 euros. Le projet de réforme des retraites prévoit de supprimer ce seuil de cession, et donc d’imposer les plus-values dès le premier euro. Le taux d’imposition de ces valeurs passerait, dans le même temps, de 18% à 19%. « [Cette mesure] est cohérente avec la démarche de diminution des « niches fiscales » entreprise par le gouvernement » explique le document remis à la presse par le ministère du travail.

Gain attendu : 270 millions d’euros en 2011, 330 millions d'ici 2020.

Suppression du crédit d’impôts sur les dividendes

Actuellement, les dividendes perçues par les actionnaires ou les sociétaires bénéficient non seulement de deux abattements, l’un proportionnel (40%), l’autre forfaitaire (1.525 euros pour une personne seule, le double pour un couple) mais également d’un crédit d’impôts égal à 50% des dividendes perçus, dans la limite de 115 euros pour une personne seule et de 230 euros pour un couple. Ce crédit d’impôts est appelé à disparaître, si le texte est appliqué dans sa forme actuelle. Justification du gouvernement : « Le crédit d’impôt se caractérise par un effet de saupoudrage, tout en étant concentré sur les ménages relativement aisés : (...) les 20% des contribuables les plus aisés concentrent près du tiers du crédit d’impôt, contre 10% pour les 20% de contribuables les moins riches. »

Gain attendu : 645 millions d’euros en 2010, 800 millions d'ici 2020.

Hausse du prélèvement forfaitaire sur les plus-values de cessions immobilières

Si le texte est voté par le Parlement, ce prélèvement passera de 16% à 17%, auxquels continueront de s’ajouter les 12,1% de prélèvements sociaux. Toutefois, l’impact de la mesure restera limité, puisque les exonérations existantes, comme celle concernant la vente d’une résidence principale, seront maintenues.

Gain attendu : 45 millions d’euros en 2011, 50 millions d'ici 2020.

Hausse du taux marginal d'imposition

Le taux marginal d'imposition, auquel sont soumis actuellement les foyers fiscaux dont le revenu net global (travail et capital) dépassait 69.783 euros en 2009, pourrait être relevé de 40% à 41%. Cette imposition supplémentaire ne serait, par ailleurs, pas prise en compte dans le calcul du bouclier fiscal.

Gain attendu : 230 millions d'euros en 2010, 290 millions d'euros d'ici 2020.

Au final, l’ensemble des mesures touchant le capital, si elles étaient confirmées, permettrait à l’Etat de récupérer 1,630 milliard par an à l’horizon 2020. Soit seulement un peu plus de 4% des 40 milliards d’euros annuels nécessaires, selon le Conseil d’Orientation des Retraites (COR), pour maintenir à flot le régime de retraite par répartition.

Dans le même temps, elles affecteront le rendement de certains produits d'épargne. Ce sera le cas des épargnants ayant opté pour le PFL et détenant des livrets bancaires bien pourvus, de ceux qui possèdent des titres mobiliers, mais aussi de millions de sociétaires, de banques mutualistes par exemple, qui perdront le bénéfice du crédit d'impôt sur les dividendes perçues grâce à leurs parts sociales.